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L’épidémie de Covid-19 a mobilisé, parfois jusqu’à l’épuisement, les systèmes de santé qui y ont fait face. Elle a aussi laissé de côté des millions de patients. Nous pensons ici à tous ceux souffrant de maladies non transmissibles (MNT ou Non-Communicable Diseases), qui ont payé un lourd tribut aux exigences de priorisation et de report des interventions non essentielles.

 

Pour remettre ces patients « invisibles » au cœur des préoccupations de santé publique, la Commission européenne a lancé mi-2022 un plan d’action ambitieux baptisé « Healthier Together-EU Non-Communicable Diseases Initiative ». De son côté, l’OMS a inscrit ces MNT comme « défi majeur » dans son programme de développement durable à l’horizon 2030. Il est temps, en France comme ailleurs, d’associer tous les acteurs de la santé à cette bataille.

 

Actionner le levier de l’innovation. Les MNT regroupent un large spectre de pathologies : maladies cardio-vasculaires, cancers, diabète, maladies respiratoires chroniques et troubles neurologiques et mentaux. Très différentes les unes des autres, elles ont cependant en commun d’être non infectieuses, chroniques, et de nécessiter un accompagnement médical au long cours. Elles sont la cause de près de 41 millions de décès chaque année, dans le monde, selon les chiffres de l’OMS.

 
« Sans plus tarder, l’innovation doit nous aider à renforcer le dépistage et à poser des diagnostics plus précoces de ces maladies, qui sont moins lourdes à gérer et de meilleur pronostic lorsqu’elles sont prises en charge tôt »

La prise en charge traditionnelle de ces pathologies représentait déjà un lourd fardeau au tournant de la décennie. Elle parait aujourd’hui plus insurmontable encore, alors que nos systèmes de santé sont toujours convalescents.

 

Sans plus tarder, l’innovation doit nous aider à renforcer le dépistage et à poser des diagnostics plus précoces de ces maladies, qui sont moins lourdes à gérer et de meilleur pronostic lorsqu’elles sont prises en charge tôt. Les outils sont à notre disposition. Ceux basés sur l’intelligence artificielle ouvrent la voie à l’échange d’information et le partage de l’expertise entre médecins et patients, pour l’interprétation des signes avant-coureurs des pathologies. Ceux basés sur la télémédecine, appuyés par des dispositifs de collecte et d’analyse des données de plus en plus sophistiqués, ont fait leurs preuves dans les champs du diabète, des maladies cardio-vasculaires ou encore de la neurologie, pour préciser au plus tôt des diagnostics complexes.

 

Ces révolutions technologiques favorisent aussi une plus grande implication des patients dans leurs thérapies. Dans le diabète, plus qu’ailleurs, les outils digitaux et l’intelligence artificielle sont déjà une réalité, et leurs bénéfices démontrés. Là, les patients peuvent s’appuyer sur des outils qui les aident au quotidien à gérer leur glycémie et ajuster leur traitement, tout en transmettant à leurs médecins alertes et analyses, pour adapter les protocoles. Il ne manque qu’une volonté politique pour que toutes les pathologies au long cours bénéficient de cette synergie entre patients actifs, données intelligentes et médecins connectés.

 

Pour une R&D centrée sur le patient. Faire reculer les MNT impose aussi de revoir nos conceptions en matière de recherche et de développement de nouveaux médicaments. Et d’encourager une R&D qui s’appuie sur les « données de vie réelle », celles-là mêmes qui sont générées par les interactions patients-soignants et les nouvelles technologies.

Ces « données de vie réelle » font progresser non seulement la compréhension des maladies, mais également le vécu des patients. Et permettent ainsi de repenser radicalement la notion d’efficacité thérapeutique. L’utilisation de questionnaires patients (Clinical Outcome Assessment ou COA), devenus ludiques, interactifs et « intelligents », rend possible, dans les essais cliniques, la mesure et le suivi des paramètres non biologiques tels que la qualité de vie, l’activité physique, l’interaction sociale ou l’adhésion au traitement et, in fine, leur prise en compte, avec la même rigueur statistique que les données biologiques.

 

Les MNT sont des maladies complexes qui ne seront pas vaincues par le seul moyen d’un vaccin ou une molécule miracle. Les faire reculer exige tout à la fois de remettre le patient au cœur du parcours thérapeutique, de la R&D et du suivi des traitements, autant que d’adopter un rapport apaisé et constructif vis-à-vis de l’innovation technologique.

 

Maryvonne Hiance, présidente du fonds de dotation HealthTech for Care, Professeur Jean-Philippe Verhoye, chirurgien cardiaque et professeur à la faculté de médecine de Rennes et
Sonia Bothorel, Managing Director du Mapi Research Trust

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